Bienvenue à Chantal et vivement la reprise
MOT DU PRÉSIDENT
Je suis heureux de vous annoncer que le conseil d’administration de la SARTEC a la chance d’accueillir Madame Chantal Cadieux, scénariste des séries Une autre histoire (2019-2020), Le Monstre (2018, adaptée du récit d’Ingrid Falaise) Mémoires vives (2013-2017) et Providence (2005-2011). Plusieurs fois nommée aux Prix Gémeaux pour le meilleur texte d’une série annuelle, Chantal remportait la statuette en 2014. Avant d’écrire ses propres séries, elle collaborait à l'écriture de plusieurs autres, dont Annie et ses hommes, Tribu.com; Hommes en quarantaine; Un gars, une fille; Zap et Ent'Cadieux. Au cinéma, on lui doit l’écriture des films Le collectionneur (adapté du roman de Chrystine Brouillet) et Elles étaient cinq. Aussi dramaturge, Chantal a écrit une dizaine de pièces de théâtre. Son expertise est un précieux atout à l’occasion des défis qui occupent la SARTEC en cette période inusitée de pandémie.
En prévision de la reprise que nous souhaitons imminente et sécuritaire, nous communiquions la semaine dernière certaines de nos préoccupations au Ministère de la Culture et des Communications (MCC) et à la Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) en prévision du guide sanitaire en préparation pour la reprise des tournages, incluant ceux en fiction.
Même si le travail d’auteur comporte moins de problèmes de sécurité sanitaire que d’autres, nous sommes inquiets par toute mesure d’un guide qui prescrirait des changements aux scénarios. C’est pourquoi nous avons informé la santé publique de la nature du travail d’auteur et que seuls des ajustements mineurs de mise en scène – appelées retouches techniques – peuvent être apportés au scénario afin de préserver son intégrité et la cohérence de l’histoire. Si des changements plus importants étaient envisagés, ils devront être considérés comme une réécriture relevant de la compétence du scénariste.
Les productions découlant de nos scénarios, si prisées ici et ailleurs, ne doivent pas perdre en qualité. Dénaturer nos œuvres pourrait entacher notre réputation et celle de l’industrie. Côté budget, si nous devions opter pour de la réécriture, en cours de développement ou en cours de production, les budgets pour porter à l’écran nos œuvres devront tenir compte de la rémunération du scénariste, sans oublier que de nouvelles dépenses seront requises pour assurer la sécurité de toutes les équipes, au tournage, dont celle de nos acteurs, de nos réalisateurs et de nos techniciens.
Ces frais additionnels pourront-ils être couverts par nos budgets habituels ? Permettez-nous de croire le contraire.
Avant la pandémie, nous déplorions déjà confiner nos imaginaires pour écrire des histoires répondant à des contraintes budgétaires excessives limitant, par exemple, le nombre de personnages et de lieux. Les productions audiovisuelles francophones d’ici se tournent avec des budgets bien en deçà de ce qui se fait ailleurs, souvent trois fois moindres qu’au Canada anglais. C’est pourquoi les récits de science-fiction, fantastiques et historiques, entre autres, voient peu le jour au Québec. Non pas faute de talents pour les écrire, mais faute de moyens pour les porter à l’écran. C’est sans aucun doute plus de moyens qu’il faut donc, à l’industrie audiovisuelle francophone d’ici, pour s’adapter à la pandémie.
Nous attendons d’ailleurs impatiemment, avec la Coalition pour la diversité des expressions culturelles, le dépôt du projet de loi promis pour adapter la Loi sur la radiodiffusion. En effet, les entreprises de programmation en ligne, jusqu’ici exemptées de l’obligation de détenir une licence, doivent contribuer au système, financer et valoriser les contenus canadiens.
Par ailleurs, la demande pour rediffuser nos œuvres écrites dans le passé se fait plus forte que jamais. À ce sujet, il convient de rappeler que l'entente collective SARTEC-SRC (article 4.1.9) prévoit la possibilité pour l’auteur de négocier plus que la tarification minimale prévue à l’Annexe M pour les rediffusions sur la plateforme Tou.TV. Ce principe fondamental mérite d’être rappelé, car certaines personnes n’ont pas cru que les auteurs avaient cette possibilité. Il faut toutefois préciser un cas particulier de rediffusion où des tarifs beaucoup plus élevés (parfois 100% du cachet d’écriture initial indexé) ne sont pas matière à négociation (article 6.3.1.). N’hésitez donc pas à communiquer avec l’équipe de la SARTEC pour toute question à ce sujet.
Bien que nous fussions bien au fait de la pandémie virulente, dont nous suivions la rapide progression, inquiets de ce qui se passait en Chine, puis en Italie et en Iran, la déclaration de l’état d’urgence au Québec nous a frappés comme un coup de massue en plein front. Au-delà de la prédominante question de santé, allions-nous pouvoir vivre de notre métier en pleine pandémie? Et pour ceux qui appréhendaient devoir écrire avec un enfant dans les pattes, comment allions-nous préserver notre bulle d’écriture ? J’ai choisi pour ma part de considérer ma Camille, qui aura bientôt six ans, comme une muse plutôt qu’un obstacle. Comment en effet ne pas être inspiré par une puce qui a l’imagination de rebaptiser le méchant microbe « Coconut virus » ?
La SARTEC est résiliente, et j’espère qu’avec le soutien de nos gouvernements, notre créativité et notre solidarité nous feront triompher. Pour offrir aux publics d’ici et d’ailleurs ces œuvres qu’ils aiment tant, et faire rayonner notre identité et notre cohésion collective, il faudra bien trouver les moyens de continuer à tourner et à diffuser nos œuvres.
Bienvenue Chantal et au plaisir de retravailler avec notre CA, en personne, le plus tôt possible…
Mathieu Plante